Péripéties d’une volontaire éducatrice à Foya (Liberia)

Alors que la neige recouvre la France d’un grand manteau blanc marquant le rythme des saisons, ici au Liberia, c’est en mois que se calcule le temps. Déjà 3 mois que j’ai posé mes valises dans ce petit bout d’Afrique de l’Ouest, injustement impopulaire (ou tristement rattaché à des événements tragiques tels que la guerre civile ou l’épidémie d’Ébola). Et pourtant, ce pays regorge de merveilles et d’étonnement principalement portés par une population très accueillante.

Je suis envoyée en tant que volontaire sur une mission d’éducation soutenue et portée par la DCC (Délégation Catholique de la Coopération), la FLM (Fraternité Laïque Missionnaire), les Amis des Naudières et la SMA (Société des Missions Africaines). J’interviens en tant que conseillère pédagogique sur deux écoles : St John Vianney Catholic school à Foya et St Agnes Catholic school à Kolahun. Le lancement de ma mission a été retardé par un calendrier scolaire complètement perturbé du faite de l’épidémie de COVID 19.

À mon arrivée mi-octobre, nous ne savions toujours pas la date de la rentrée scolaire (plusieurs fois décalée). Le 01 décembre 2020 était la date officielle désignée. Mais l’agitation des élections sénatoriales le 08 décembre a accaparé le feu des projecteurs. Nous n’avons que doucement commencés à accueillir professeurs et élèves dès le 14 décembre. Un retour en douceur après plus de 8mois d’absence des bancs de l’école et tempéré par les vacances de fin d’année peu de temps après. 10 jours de présence scolaire à s’attacher à créer du lien avec les élèves, à réapprendre à être dans une posture d’apprentissage et d’enseignement par des activités pédagogiques et ludiques.

Une première manière également de sensibiliser les équipes enseignantes au principe « d’apprendre en s’amusant », concept novateur et éloigné du système encore très descendant ici (le professeur qui dicte, parle face au tableau noir et les élèves qui écoutent, répètent, écrivent). Il faut reconnaître qu’ici les outils pédagogiques sont très limités et qu’il faut redoubler d’inventivité quand nous ne disposons que d’un tableau noir et de quelques livres et manuels (en nombre insuffisant par rapport au nombre d’élèves).

04 janvier 2021, c’est la rentrée ! Défilé des élèves en uniforme et début du suivi du programme scolaire. J’interviens 3 jours/semaine à l’école de Foya et 2 jours/semaine à l’école de Kolahun. J’assure une présence éducative tantôt renfort/relai des enseignants, tantôt plus coordinatrice et observatrice. Je crée des outils pédagogiques, impulse des temps d’échange et de réflexion d’équipe pour établir des axes éducatifs et j’ai déjà animé deux jours de formation.


Étant la première volontaire sur cette mission, j’ai à cœur de soigner les bases et de co-construire mon intervention avec les équipes pédagogiques. Après une certaine frustration face à la lenteur du lancement de ma mission, aujourd’hui, j’applique le célèbre diction d’ici « small small » pour ne pas faire d’écart de route. Les chantiers de développement sont titanesques au Liberia et l’éducation reste encore trop au second plan (salaire très sommaire, peu ou pas de moyens pédagogiques, difficultés d’accès aux directives éducatives gouvernementales, problème d’accès à l’éducation pour les plus démunis, etc…).  Je réajuste à chaque instant mes objectifs et m’adapte constamment aux nouvelles découvertes, observations et demandes. Cette capacité d’adaptation demande d’adopter la « stratégie du pas à pas »  et de viser des priorités à cours terme. Les équipes enseignantes sont très investies et avides de nouveaux apports, soutiens pédagogiques pour augmenter la qualité de leur école et avoir de nouvelles compétences professionnelles. Pour autant, le problème de scolarisation au Liberia reste majeur et il y a encore trop de nombreux enfants qui ne peuvent accéder ou poursuivre leur scolarité correctement. Cette situation s’est encore plus aggravée cette année avec les restrictions COVID (moins de travail…). Je gère un programme de soutien à la scolarisation d’enfants (vous pouvez faire un don sur le site On participe Cagnotte « Au nom de l’Education !» Lien https://www.onparticipe.fr/cagnottes/WZo141gr).

Quelques informations sur mes écoles d’intervention :

L’école St John Vianney Catholic school à Foya a vu son nombre d’élèves presque tripler cette année. Hausse qui peut s’expliquer par les nombreux programmes de soutien à la scolarité mais surtout l’attractivité du collège limitrophe (projet porté par les SMA) en cours de construction qui assurerait une continuité pédagogique. Face à cette hausse, nous avons dus ouvrir en urgence une nouvelle classe (anciennement salle des professeurs). La nécessité d’un bâtiment exclusivement réservé à la maternelle (trois niveaux) se fait de plus en plus ressentir et s’inscrire dans les projets futurs (nous sommes en recherche de fonds).

 

L’école St Agnes Catholic school de Kolahun débute une nouvelle année dans des locaux tout neuf. A l’approche de la rentrée, nous avons finis d’équiper en urgence les classes (tableau noir, table+chaise pour les professeurs, etc…). Ils disposent de presque aucun matériel pédagogique ce qui rend ma mission encore plus challengeante. Le 29 janvier 2021, l’Évêque du Diocèse est venu bénir l’école et les élèves. Une belle journée de célébration et de mise à l’honneur de l’Éducation.

En plus, de mes intervention en tant que conseillère pédagogique, je propose à un plus large public aussi des cours de sensibilisation à l’informatique et des cours de français pour débutant (nous sommes frontaliers avec la Guinée Conakry francophone). Je suis aussi très investie auprès des enfants de ma paroisse St John Vianney où j’apporte mon soutien dans l’animation de jeux et temps éducatifs. C’est un véritable bonheur d’être accueilli chaque jour par des éclats de rire et cette joie de vivre enfantine.

J’en profite pour vous souhaiter une heureuse année 2021.

Marie Cambuzat